Avec l'homme augmenté, on parle beaucoup de la fusion "homme machine" qui permettrait de restaurer (dans les prothèses) ou d'augmenter les capacités du corps humain. Certains parlent de révolution, de l'arrivée imminente du cyborg, d'autres se font simplement le canal d'un message assez optimiste sur ces interfaces, par exemple cet article du Point : https://www.lepoint.fr/high-tech-internet/les-exploits-de-l-homme-bionique-12-04-2012-1452106_47.php qui conclut sur les paroles de Hugh Herr, amputé et directeur d'un Labo du MIT, qui prédit que même les valides souhaiteront se faire amputer, comme ceux qui le sont déjà qui plébiscitent ces prothèses modernisables et remplaçables en voulant même étendre plus haut leur amputations !
Nathanël Jarrassé (site 13 minutes)
Un chercheur en Robotique, Nathanaël Jarrassé (voir image, son site : http://www.n-jarrasse.fr/) , spécialiste des prothèses explique que cette idée très médiatisée de la fusion homme-machine est bien en deçà de la réalité. Il l'explique dans un article qu'il a écrit sur le sujet : "Le mythe de l'humain augmenté" https://lejournal.cnrs.fr/billets/le-mythe-de-lhumain-augmente sur le site "Le Journal du CNRS", mais aussi dans une vidéo au format "treize minutes" : https://vimeo.com/339127830 dont voici un résumé.
Il mentionne d'abord toutes les figures cinématographiques qui entretiennent ce mythe (ou au moins son imminence) : Robocop, Terminator..puis ces figures médiatiques : Oscar Pistorius, Aimee Mullins, Hugh Herr. Il prend un exemple d'une personne amputée d'un bras, équipé d'un bras "bionique" du commerce. Une prothèse myoélectrique (voir image) qui malgré son look futuriste en carbone (pour se rapprocher des canon du cyborg plutôt que de ceux de la personne handicapée) n'a "peu ou pas" évoluée depuis les années 60 où elle est apparue ! Son principe : se servir de contraction de muscles sur son membre résiduel pour donner des ordres à la prothèse : cela marche avec 2 signaux. La difficulté est de commander la préhension, la rotation du poignet, les doigts. On utilise alors une sorte de code morse : c'est quelque chose de complexe à apprendre, contre-intuitif et cela met beaucoup de temps et exige une forte concentration.
Au niveau de la recherche, les choses sont un peu plus avancées : on peut solliciter de plus grandes terminaisons nerveuses qu'il faut aussi réeduquer, et on peut se faire assister des algorythmes de machine learning pour décoder les contractions et les associer à des fonctions de la prothèse, mais cela reste très séquenciel et nécessite aussi un apprentissage assez long. Mais ne peut on pas se brancher directement dans le cerveau ? Nous en somme au même point mais ici avec des états cérébraux : avec des électrodes, on peut détecter des états pour ensuite faire des actions (serrer la main etc..) avec la aussi un apprentissage long (2 ans, plusieurs heures par semaines pour déplacer une main, attraper un objet). De même la simulation du toucher en se connectant au terminaisons nerveuse, donnera un "retour" par rapport à une sensation, mais différentes du toucher réelle, cette information devant être aussi interprétée par le cerveau. C'est la même chose pour les implants (pacemaker, pompe à insuline...), le corps doit aussi apprendre à fonctionner avec ces organes de substitution.
Ce qui est faux quand on parle de cette fusion est donc l'instantanéité. D'ailleurs, notre propre corps, nous avons dû apprendre à le maîtriser (quand on était bébé). C'est aussi du temps qu'il nous faut pour acquérir des expériences sensori-motrices comme la danse ou le chant.. Il y a finalement plus de fusion homme machine entre un virtuose et son violon...Le performance dans cette fusion homme machine vient de l'humain...